Le tram-train du lac d'Annecy.

L'ARDSL milite depuis plusieurs années pour la réhabilitation de la ligne ferroviaire reliant Annecy à Albertville. Elle est aujourd'hui démantelée et convertie en voie verte entre Annecy et Ugine, mais continue d'être exploitée pour un train de fret entre Ugine et Albertville.


L'ARDSL souhaite un retour du transport ferré de voyageurs sur cet axe, sous la forme d'un tram-train. Mais pourquoi ce mode de transport plutôt qu'un autre ? Explications dans ce dossier.

Historique de la ligne.


La ligne ferroviaire Annecy - Albertville (n° 898 000) a été inaugurée en 1901. Initialement longue de 45 km, elle relie la Haute-Savoie à la Savoie en longeant le lac d'Annecy tout en passant par Saint-Jorioz, Doussard, Faverges et Ugine.


La ligne voit passer de nombreux trains de voyageurs jusqu'à la Seconde Guerre Mondiale. Les trains les plus rapides des années 1930 relieront Annecy à Albertville en seulement 1h15, avec des locomotives à vapeur. À titre de comparaison, la voiture met aujourd'hui difficilement moins d'une heure, et le tram-train pourrait faire le trajet en 45 min.


Le trafic voyageur est définitivement suspendu en 1938, à l'exception d'un train pour ouvriers entre Ugine et Albertville, qui subsitera jusqu'en 1953. La ligne est déclassée tronçons par tronçons jusqu'à ce qu'il ne reste que la portion Albertville - Ugine en 2008.


En 1974, le tronçon Annecy - Bredannaz est converti en piste cyclable, il en sera de même pour le tronçon Bredannaz - Ugine en 2005.

Histoire Annecy-Albertville.pdf

La ligne aujourd'hui : zoom sur la desserte de l'usine Ugitech.


De nos jours, la ligne n'accueille donc plus aucun voyageur. De Annecy à Ugine, nous retrouvons une piste cyclable, permettant de réaliser le tour du lac d'Annecy à vélo et très prisée par les touristes.


De Ugine à Albertville, les rails sont toujours présents mais n'accueillent plus que la desserte marchandises de l'usine Ugitech. Cette portion d'environ 8 km fait d'ailleurs l'objet d'un renouvellement complet. Les travaux, débutés en 2021 et devant se terminer en 2024, coûtent 4,5M € et sont co-financés par le département de la Savoie (31,1%), l'État (30%), la région Auvergne-Rhône-Alpes (30%), SNCF Réseau (5,6%) et la communauté de communes Arlysère (3,3%).


Notons que cette portion sert à acheminer 2 400 tonnes de matières premières par semaine, et cela grâce à 4 trains/semaine, là où il faudrait 100 camions. Les trains servent également à expédier 40 000 tonnes de produit fini par an. Ce report modal est une très bonne chose pour la vallée de l'Arly et sa surchargée RD 1212, qui se voient délestées de milliers de camions tout au long de l'année.

Premiers travaux de regénération de la portion Ugine - Albertville (source).

La ligne aujourd'hui : le projet de tram-train.


Qu'est-ce qu'un tram-train ?

Un tram-train a l'apparence d'un tramway standard. Seulement, il peut rouler plus vite (100 ou 120 km/h contre 70 ou 80 km/h pour un tramway). De plus, il peut rouler en ville, mais aussi sur une voie ferrée "standard", telle que la portion restante entre Ugine et Albertville. Enfin, son aménagement peut être adapté pour des distances de trajet plus longues qu'un tramway urbain. Le tram-train a ainsi vocation à desservir des zones périurbaines, suburbaines et urbaines, quand un tramway se contente des zones urbaines et parfois suburbaines. En France, il existe des trams-trains à Lyon, Nantes, Mulhouse ainsi qu'en région parisienne.

Un tram-train entre Nantes et Châteaubriant (source).

À Mulhouse, un tram-train (à gauche) croise un tramway urbain "standard" (à droite) (source).

L'état des lieux : la RD 1508 complètement saturée.

Depuis la regrettable fermeture de la ligne au trafic voyageur et de sa transformation en piste cyclable, les bords du lac d'Annecy sont assaillis de voitures chaque jour, et ce en toute saison. En été, c'est le trafic touristique qui engorge la RD 1508, tandis qu'en hors-saison ce sont les pendulaires qui sont présents en très grand nombre. Avant le Covid, la route voyait passer en moyenne 22 700 véhicules par jour entre Annecy et Sévrier. En 2019 a été observé un pic à 27 000 véhicules/jour !


Un report modal possible et réaliste.

En prenant le taux d'occupation moyen d'une voiture pour un trajet de courte distance (1,43 personne/véhicule, source), on obtient donc une moyenne d'environ 32 500 trajets entre Annecy et Sévrier par jour. Or, un tram-train standard a une capacité de 240 places. De 22 700 véhicules par jour, nous pourrions passer à seulement 135 passages de trams-trains/jour, soit environ 68 allers-retours de trams-trains. Cela reviendrait à avoir une cadence d'un tram-train toutes les 30 minutes, en continu de 6h à 22h. En pratique, il serait même possible de faire passer un tram-train toutes les 15 minutes.


Passer de 22 700 véhicules/jour polluants et bruyants à 1 tram-train électrique, moderne et rapide toutes les 30 minutes, ce n'est pas une si mauvaise idée n'est-ce pas ?


La fausse bonne idée : le bus à haut niveau de service (BHNS).

L'ARDSL soutient pleinement le projet de tram-train. Malgré toutes les mobilisations menées pour mettre en place la reconstruction de la ligne Annecy - Albertville, les élu·es annécien·nes ont acté le 27 janvier 2022 un projet de nouveau réseau de transport pour l'agglomération d'Annecy. Problème : c'est un bus à haut niveau de service (BHNS) qui y est prévu, et seulement entre Annecy et Duingt. Les élu·es promettent un service cadencé toutes les 5 minutes en heures de pointes. Un projet à première vue alléchant, mais qui cache une autre réalité. L'emprise d'une route de BHNS en site propre (où seul le BHNS est autorisé à circuler) est de minimum 6,50 m de large, hors-stations (source). Un tram-train n'a lui besoin que d'une voie unique (à l'exception de croisements dans certaines stations), mesurant 3 m de large. Il est aisé de se rendre compte de la place économisée par le tram-train grâce au document ci-dessous.

Emprises Annecy-Albertville.pdf

Notons qu'en terme de végétalisation, le tram-train a l'avantage sur le BHNS. En effet, là où une double-voie de BHNS est en bitume sur 100% de sa surface, une voie de tram-train peut être recouverte d'herbe à environ 93%, correspondant à l'ensemble de la plateforme, moins l'espace occupé par les rails. À l'heure de la végétalisation des espaces pour apporter plus de fraîcheur et moins d'artificialisation, le tram-train semble tout indiqué.


Enfin, le BHNS est bien plus coûteux que le tram-train. En effet, si l'investissement sur le matériel roulant est moins important (un BHNS coûte moins cher qu'un tram-train à l'achat), le tram-train est avantageux sur le long terme. Un tram-train a une durée de vie d'environ 40 ans, quand les BHNS peinent à dépasser les 15 ans. Un renouvellement du matériel doit donc se faire plus fréquemment avec un BHNS.


En plus du matériel, la plateforme doit aussi être renouvelée plus souvent avec un BHNS : les bus passant toujours au même endroit des dizaines de fois par jour, des ornières vont rapidement se creuser, demandant un bitumage intégral au bout d'une dizaine d'années seulement. Une voie de chemin de fer n'a besoin d'un renouvellement complet que tous les 50 ans environ.


Un autre gros problème handicape le BHNS : le franchissement du Semnoz pour sortir d'Annecy. Dans les deux cas, il n'y a pas assez de place pour faire passer le BHNS ou le tram-train le long de la RD 1508, au bord du lac. Cependant, le tram-train peut aisément passer par le tunnel de la Puya, vestige de la ligne originelle et dont la restauration est estimée à 15M €. Pour le BHNS, le tunnel de la Puya est trop étroit : il faudrait alors construire un nouveau tunnel, pour pas moins de 280M €.


Un résumé par les chiffres

Le surcoût lié à l'achat de trams-trains plutôt que de bus est facilement gommé par le moindre coût de la rénovation du tunnel de la Puya. En tout et pour tout, le tram-train coûte 268,6M € d'investissements (matériel roulant compris) puis 8,9M € de coût de fonctionnement. Pour le BHNS, c'est 354M € d'investissements pour 10,6M € de coût de fonctionnement.


Sur l'horizon 2030, le tram-train amènerait 23 000 voyages/jour contre 6 000 pour le BHNS. Le tram-train aurait un impact très positif sur l'engorgement de la RD 1508, tandis que le BHNS aurait un impact modéré.


En terme de temps de trajet, comptez 45 minutes pour faire Annecy-Faverges en BHNS contre 30 minutes en tram-train, et même 45 minutes pour Annecy-Albertville.


Qu'en pensent les habitant·es du Grand Annecy ?

Nous avons expliqué ici pourquoi le tram-train était la seule solution à répondre à la fois aux problématiques de désengorgement de l’axe, des temps de trajet trop longs, de l’accessibilité d’Annecy, de la pollution et du tourisme.


Nous nous sommes ensuite demandé quelle était l’opinion de la population et quelles étaient leurs attentes réelles en matière de mobilité au sein du Grand Annecy et autour de l’axe Annecy-Albertville.


Nous avons donc choisi de demander une étude sérieuse à l’Université Savoie Mont Blanc sur le sujet, afin d’avoir les chiffres exacts des attentes réelles de la population. Le choix de l’université s’explique par l’intérêt qu’apporte une étude extérieure, par son sérieux et son recul sur les sujets, garantissant une neutralité des questions et du traitement de l’étude, afin de demeurer totalement exhaustifs sur la réalité.


Cette étude a donc été réalisée très rigoureusement et abordée d’un point de vue strictement professionnel, afin de demeurer impartial sur les résultats, et ce même si ceux-ci n’étaient pas forcément acquis dès le départ.


Ainsi, nous pouvons donc prouver scientifiquement que les habitant·es du Grand Annecy sont très demandeur·euses d’un tram-train reliant Annecy à Albertville, et que pour elles et eux (83% des sondé·es), le tram-train est plus important que le projet LOLA (tunnel sous le Semnoz et BHNS) et doit être réalisé en priorité.

On peut aussi relever que presque 9 sondé·es sur 10 se disent prêt·es à utiliser le tram-train, ce qui impliquerait un report modal très important.

Ce qui attire le plus les usagers vers le tram-train, c’est sa rapidité (gain de temps conséquent sur le parcours par rapport à la voiture), et le fait que cela permette de réduire la pollution.

Ainsi, le tram-train serait en réalité infiniment plus attractif que le BHNS du projet LOLA, et même que la voiture, ce qui donnerait à ce moyen de transport du 21e siècle un avantage très important en matière de report modal et de diminution des bouchons et de la pollution.


Enfin, près de 4 sondé·es sur 5 (sud de l’agglo) se rendent soit sur Annecy, soit sur Albertville, ce qui fait de cet axe un axe complet qui ne peut être traité que dans son intégralité.


On peut donc en conclure que les habitants du Grand Annecy attendent avec impatience la mise en service du tram-train, et qu'ils comptent sur leurs élu·es pour se saisir de ce sujet pour pouvoir enfin répondre à leurs besoins de mobilités.


Vous trouverez ici l'étude complète sur les déplacements et attentes des habitant·es du Grand Annecy.


Conclusion.

Le tram-train du lac d'Annecy est donc un projet souhaitable, autant pour désengorger un territoire prisonnier du trafic routier que pour lutter contre le réchauffement climatique, au moyen d'aménagements pensés pour l'avenir et pérennes. Il est avantageux aussi bien sur le plan environnemental qu'économique. 


L'ARDSL s'engage pleinement sur ce projet. Pour toute question/suggestion à ce propos, nous vous invitons à remplir ce formulaire de contact.

 

Les données énumérées dans ce dossier sont issues pour partie de l'étude comparative des modes de transports pour la liaison Ouest du lac d'Annecy, réalisée en 2019 par BG ARTELIA. Retrouvez ici l'analyse complète de l'étude.